• Avant tout

    Dans mon état comateux, je sentais le froid m'envahir. J'essayai de me mettre en boule pour me réchauffer, sans succès. Je tâtai mon matelas de mes mains, à la recherche de ce qui avait la tâche de me garder au chaud.

    Et je râlai.

    D'un élan soudain, je m'assis en ouvrant les yeux. Je m'habituai à la noirceur de la pièce tout en rampant jusqu'au pied de mon lit, endroit où je retrouvai mes couvertures sur le sol.

    《Encore...》 murmurai-je à
    moi-même.

    Cette situation était souvent le résultat de mon sommeil mouvementé. Mon réveille-matin m'était totalement inutile vu le froid qui, quotidiennement, envahissait mes pieds nus.

    Alors que j'étais en pleine tentative de réchauffement, enroulée en saucisson dans mes couvertures,
    j'entendis des bruits de pas ainsi que la porte d'entrée qui se refermait. J'étais seule à la maison depuis trois jours et j'espérais sincèrement que c'était mes parents qui revenaient enfin.

    À partir du moment où ils étaient partis à l'hôpital avec ma sœur Avigail, je n'ai pas eu une seule nouvelle. Depuis quelques semaines, elle était faible et n'avait que des migraines successives. De plus, tout avait empiré dans les derniers jours. Elle toussait à en pleurer et n'avait plus d'énergie. Mes parents ont fini par réagir et faire quelque chose pour elle, la situation devenant invivable pour tous.

    J'allais descendre les escaliers afin d'aller les rejoindre, mais je les entendis échanger et je décidai de plutôt les écouter.

    《Taliah, commença rudement mon père, tu savais très bien que ceci arriverait, c'est la même situation qu'il y a cinq ans qui se répète et qui, sois en sûre, n'est pas encore terminée!》

    Il parlait d'une voix un peu trop autoritaire. De plus, en prenant ses propos et son ton en considération, j'en déduisis que ma sœur n'était pas avec eux. Était-elle restée à l'hôpital?

    Je me couchai au sol, sur le ventre, près des escaliers. Je ne voulais pas être aperçue.

    Et je voulais en savoir plus.

    《Chuuut, Kiel. Et si jamais
    Rivka était réveillée? Elle ne devrait pas nous entendre parler de ça... du moins, pas pour l'instant, répliqua ma mère d'une voix faible et incertaine.》

    J'attendais des informations. Surtout que, maintenant, je savais que je ne devais pas savoir.

    《Rivka, Rivka, mais tu sais bien que ça lui arrivera à elle aussi! Diable Taliah, cette gamine avait peur de son ombre jusqu'à ses quatre ans!》

    Je grimaçai. Outre ce geste, si vous croyez que cela aurait pu être le cas, je n'étais pas surprise. Comparée à mes sœurs, je me retrouvais assez basse dans l'estime de mon père et je crois bien que ça ne pourrait jamais changer.

    Quoique, en pire, c'était toujours envisageable.

    Des sanglots provenant de ma mère m'arrachèrent à mes pensées. Malgré l'envie d'aller la voir, je fis demi-tour rapidement dans ma chambre en me recouchant sur mon lit. J'avais envie d'aller m'enfouir dans ses bras parce que ce n'est jamais facile de voir sa mère en pleurs, mais je ne le fis pas pour ne pas me dévoiler dans mon écoute discrète. J'attendis donc sur mon lit en faisant semblant de dormir, après tout, ils reviennent de trois jours d'hôpital donc ils chercheront certainement à m'aviser de la situation.

    Peu de temps après, les yeux fermés, j'entendis la porte grincer en s'ouvrant lentement et cela me donna une raison pour simuler un réveil.

    《Oh ma chouette, tu dormais encore? me demanda ma mère d'une voix enrouée.》

    Je me retournai sans un mot pour lui faire face alors qu'elle s'assoyait sur mon lit. Son visage semblait avoir pris plusieurs années, elle qui paraissait habituellement beaucoup plus jeune que son âge. Sur son cou brillaient les larmes qui s'étaient tracées un chemin et sur ses joues de nouvelles ruisselaient. La tristesse qui recourbait ses épaules habituellement si droites et fières m'envoyaient une vague de questions supplémentaire en tête.

    《Que se passe-t-il? M'inquiétai-je après mon d'observation. Tout va bien?》

    Elle me regarda d'un air désolé si intense que je me rappelai n'avoir vu qu'une seule fois sur son visage. Un éclair de mémoire datant de quelques années me rappela les circonstances précédentes, qui avaient entouré ma plus vieille sœur, Pia. La douleur s'empara de moi alors que je devinai les paroles que ma mère devait me dévoiler.

    Et, malheureusement, j'eus raison sur ces paroles qui, comme celles à propos de ma plus vieille soeur, m'hanteront probablement l'esprit pendant toute ma vie.

    《Rivka, ils n'ont pas
    pu sauver Avigail...》
     


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